08/05/2002

Raritätenkasten - Film-journal, 1997 - ...


Triptyque super 8, couleur, sonore, durée variable.
3 projecteurs super 8, rythme de défilement 18 images/sec.
3 écrans sur pied ou un écran d'une base minimum de 4 mètres.
1 platine CD avec fonction " random " ou programmation de l'ordre de lecture des plages.
1 sono. 


“A la base de mon journal filmé, il n’y a donc pas de script. Il y a la caméra et la vie. Je n’ai pas de plan, aucune idée précise, uniquement le hasard. Il n’y a dans le fond aucune raison de filmer plus telle ou telle chose, si ce n’est la sensibilité, la manière singulière d’être au présent.“(1)

Tourné en super 8 couleur ce film-journal est présenté sous la forme d’un triptyque horizontal. Le montage est effectué directement dans la caméra lors de la prise de vue, « tourné-monté », aucune intervention de montage à posteriori n’est donc effectuée sur les bobines. Chaque cartouche de film super 8 d’une longueur de 15 mètres est montrée dans son intégralité. Les prises de vues sont effectuées image par image, par salves rapides, le plus souvent de manière automatique et parfois même sans cadrer. Le film combine des prises de vues effectuées lors de déplacements, de voyages, de rencontres à d’autres effectuées au banc titre à partir de photos, de cartes postales et de toute une collection d’images récoltées au fil du temps ou encore à des images vidéo reprise par Kinéscopage. La bande son est elle aussi le fruit d’un collectage de sources diverses et variées : dialogues de films, extraits d’émissions télé ou radio, morceaux de musiques de styles hétéroclites. Ces multiples sources sont ensuite assemblées de manières aléatoires ou automatiques par le biais de logiciels de séquençage son.
Raritätenkasten (2) est présenté dans sa version intégrale mais non définitive, ce film est un « work-in-progress ». Il n’y a pas ici de recherche de concordance synchronique de l’image et du son, bien au contraire, c’est d’avantage dans des rapports contrapuntiques aléatoires que s’établissent les relations potentiellement signifiantes. La présentation de ce film obéit néanmoins à quelques contraintes strictes. 
Lors de chaque projection les différentes bobines de 15 mètres sont assemblées en nombre égal sur trois bobines de 120 mètres, l’ordre est déterminé par un tirage au sort. De manière similaire la bande son sur CD est constituée de plages de trois minutes chacune dont le défilement lors de la projection est abandonné à la fonction « random » (lecture dans un ordre aléatoire) de la platine. 
 
Les images et les sons sont ici totalement libérés d’une servitude au récit. Ils ne sont pas contraints dans un rôle prédéfini. Ils n’illustrent pas une intrigue mais déclenchent des intrigues. Ils sont introduits de manière aléatoire de façon à s’inscrire les uns par rapport aux autre dans une dissociation totale. Les deux composantes image et son ne s’expliquent pas mutuellement de manière systématique mais parviennent parfois à s’associer comme compléments. Ce film donne à assembler un puzzle qui doit sans cesse être manipulé. Les combinatoires d’images déclenchent un flot de significations, chargent les combinaisons à l’excès. Ce film est un entrelacement de couches de souvenir à réactiver, il est à envisager comme une machine à mémoire.

Quelques projections publiques :
- Festival Bazouges fait son cinéma, Bazouges-sous-Hédé, 31 mai 2003.
- Super 8 mai, Les ateliers du vent, Rennes, 8 mai 2002.
 
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1. MEKAS Jonas, L’invention du journal filmé (entretien avec Jonas Mekas), propos recueillis par Léa Gauthier, Mouvement, n° 27, mars-avril 2004, p. 28. 
2. "L'expression " Raritätenkasten " designe ces kaléidoscopes (Guckkasten) que l'on montrait dans les foires au XVIIIe siècle. Goethe l'employa souvent, en général pour désigner une série d'images qui ne sont pas présentées dans un ordre systématique et rationnel. ", note 117, dans, GŒTHE Johann Wolfgang, les souffrances du jeune Werther, éd. GF-Flammarion, 1987.